REFORME DE LA PROCEDURE CIVILE D’APPEL : Nouveau décret n°2023-1391 du 29 décembre 2023 portant simplification de la procédure d’appel en matière civile.
Ce nouveau décret sera applicable aux instances d’appel introduites devant la cour d’appel à compter du 1er septembre 2024 et aux instances sur renvoi de cassation lorsque la juridiction de renvoi est saisie à compter de cette date.
Si le décret a le mérite de réorganiser les textes applicables en matière d’appel de manière plus cohérente et compréhensible et supprimer les renvois aux dispositions applicables en première instance, il n’emporte aucune simplification de la procédure d’appel contrairement à ce qui est annoncé dans sa dénomination.
Les points à retenir sur le contenu de la réforme :
–Sur le contenu de la déclaration d’appel :
La déclaration d’appel, en vertu de l’article 901 du code de procédure civile, et à peine de nullité, doit préciser l’objet de l’appel, à savoir s’il s’agit d’un appel tendant à l’infirmation ou à l’annulation.
La déclaration d’appel doit également énoncer les chefs du jugement critiqués s’il tend à l’infirmation.
L’appel étant limité aux chefs du jugement critiqués, une particulière vigilance doit être portée à la rédaction de la déclaration d’appel.
–Sur l’étendue de la dévolution :
- Procédure avec représentation obligatoire :
C’est l’acte d’appel qui fixe l’ampleur de la dévolution.
L’article 915-2 du code de procédure civile apporte une certaine souplesse puisque « l’appelant principal peut compléter, retrancher ou rectifier, dans le dispositif de ses premières conclusions remises dans les délais prévus au premier alinéa de l’article 906-2 et l’article 908, les chefs du dispositif du jugement critiqués mentionnés dans la déclaration d’appel. »
- Procédure sans représentation obligatoire :
La déclaration d’appel doit indiquer les chefs de jugement critiqués. Si aucun chef n’est mentionné, la dévolution s’opère pour le tout. S’il est mentionné des chefs de jugement, alors la dévolution opère pour ces seuls chefs mentionnés.
–Sur la notification de la déclaration d’appel dans une procédure à bref délai :
Si l’appelant doit toujours procéder à la signification de la déclaration d’appel à peine de caducité, il doit y procéder, selon les termes de l’article 906-1 du Code de procédure civile, dans un délai de 20 jours à compter de l’avis de fixation transmis par le greffe et non plus dans un délai de 10 jours.
L’avis de fixation doit être joint à cette signification.
–Sur la rédaction des conclusions :
L’article 954 du Code de procédure civile qui entérine la jurisprudence de la cour de cassation issue de l’arrêt du 17 septembre 2020 (cass civ 17 septembre 2020 n°18-23.626) prévoit que les conclusions comprennent un dispositif dans lequel l’appelant indique s’il demande l’annulation ou l’infirmation du jugement.
L’article 954 prévoit également que si l’appelant conclut à l’infirmation les conclusions doivent comprendre un dispositif dans lequel il énonce les chefs du jugement critiqués.
Même si cela était déjà le cas dans la pratique quotidienne, il sera nécessaire de veiller à n’oublier aucun chef, au risque que la cour ne se prononce pas sur la prétention résultant de ce chef.
–Les pouvoirs du conseiller de la mise en état :
Les articles 913 et suivants du code de procédure civile définissent de manière parfaitement claire les pouvoirs juridictionnels du conseiller de la mise en état qui sont les mêmes que ceux accordés au juge de la mise en état en première instance sans désormais renvoyer aux articles relatifs à la mise en état de première instance. (Respect de la ponctualité des échanges de conclusions, communication de pièces, jonction et disjonction, retrait du rôle…)
Il est rappelé que le conseiller de la mise en état est compétent pour se prononcer sur la caducité de la déclaration d’appel, sur l’irrecevabilité de l’appel, des actes de procédures, des conclusions d’appel.
Il est également indiqué qu’il statue sur les exceptions de procédure relatives à la procédure d’appel et les incidents d’instance mettant fin à l’instance d’appel.
Le conseiller de la mise en état n’a à connaître que des fins de non-recevoir listées au décret, à savoir :
-irrecevabilité de l’appel,
-irrecevabilité des conclusions d’appel
-irrecevabilité des actes de procédure
-irrecevabilités des interventions en appel.
– La procédure avec mise en état :
L’article 908 prévoit toujours un délai de 3 mois pour l’appelant pour la remise de ses conclusions au greffe.
Aucun changement pour l’intimé qui dispose également d’un délai de trois mois à compter des conclusions de l’appelant pour déposer ses propres conclusions.
L’article 911 alinéa 2 du code de procédure civile prévoit que les délais prévus à l’article 908 et 910 peuvent être réduits ou allongés par le conseiller de la mise en état, à la demande d’une partie ou d’office.
-La procédure ordinaire à bref délai :
Le décret du 29 décembre 2023 prévoit désormais que l’ordonnance de protection relève de la procédure à bref délai.
Selon les termes de l’article 906-2, qu’il s’agisse de l’appelant, de l’intimé ou de l’intervenant, le délai pour déposer ses conclusions au greffe passe de 1 mois à 2 mois.
C’est le Président de chambre qui connait des incidents dans le cadre d’une procédure à bref délai. Il connait de la caducité de la déclaration d’appel, des conclusions et des actes de procédures.
Le nouveau décret lui octroie désormais les compétences suivantes :
-irrecevabilité de l’appel et des interventions en appel
-incident mettant fin à l’instance
-désistement
-extinction de l’instance suite à un accord
-Le renvoi de cassation
Le délai pour signifier la déclaration de saisine est allongé de 10 à 20 jours à compter de la déclaration de saisine.
-La procédure sans audience
Uniquement prévue pour la procédure de première instance, le décret étend désormais la procédure sans audience à la procédure d’appel, qu’il s’agisse de la procédure à bref délai ou de la procédure avec mise en état.
A la demande des parties ou des avocats, après accord, le cas échéant, du ministère public, le conseiller de la mise en état ou le président, s’il considère qu’il n’y a pas lieu à plaidoirie, pourra autoriser le dépôt des dossiers au greffe de la chambre, à une date qu’il fixe à sa convenance.
(Article 906-5 et 914-5 du code de procédure civile)
Dans les faits, ces textes ne servent qu’à entériner une pratique déjà courante.
Pour conclure, il s’avère que ce nouveau décret n’a en rien décomplexifiée la procédure d’appel.
Le recours à un avocat spécialiste en la matière s’avère toujours aussi essentiel pour espérer échapper aux écueils de la procédure d’appel.
N’hésitez pas à contacter le cabinet pour vos postulations devant la Cour d’appel de CAEN.
Mickaël DARTOIS, avocat à CAEN, spécialiste en procédure d’appel